MEMOIRE DU BX VLADIMIR GHIKA
EN LA
FÊTE DE LA T.S. TRINITE
Le Bienheureux Vladimir fut un homme consumé
dans l’amour de Dieu. Sa charité, vous le savez, trouve sa source dans la
célébration de la messe. Il allait jusqu’à dire que la visite des pauvres était
la messe continuée au fil de la journée. Nous admirons l’amour qu’il a su
répandre autour de lui dans les circonstances les plus difficiles et les plus
tragiques, que ce fût quand il était chapelain à la Chapelle des étrangers,
dans la baraque de Villejuif, encore plus en Roumanie et même jusqu’au fond de
sa prison de Jilava. Et nous ne parlons pas de la première moitié de sa vie
quand il était laïc tout dévoué à un apostolat de charité. Le Bienheureux
était très sensible à saint Jean. Or saint Jean nous dit sans ambages :
« Dieu est amour ». Jean ne nous pas parle pas seulement d’une qualité
de Dieu mais de Dieu en ce qu’il est au terme d’une longue méditation de la
révélation de Jésus-Christ. Dieu est amour parce qu’il est communion d’amour
entre le Père et le Fils dans l’Esprit-Saint. L’évangile révèle la Trinité, la
tri-unité de Dieu. Que notre Bienheureux accompagne notre réflexion.
D’abord le dogme
de la Trinité est essentiel au christianisme et le distingue des autres
religions monothéistes, islam et judaïsme.
L’islam présente
un Dieu transcendant, bon et miséricordieux mais totalement extérieur au monde
des hommes. C’est un monothéisme absolu qui ne tolère aucun anthropomorphisme.
Ainsi, le fait que Dieu engendre est inadmissible. Le Coran se fait d’ailleurs
une idée tronquée de la Trinité : il nous traite, nous chrétiens, de polythéistes
parce que, selon lui, la Trinité est composée de Dieu, de Jésus (Issa) et de la
Vierge Marie. Le judaïsme, héritier de la religion de l’ancien Israël, confesse
aussi un monothéisme absolu. Mais nous avons cela en commun que le Dieu de la
Bible est le Dieu de l’Alliance, ami des hommes, Père et créateur communiquant
sa Parole aux hommes. La littérature de Sagesse dont le sommet est atteint par
la 1ère lecture, développe un nouvel aspect de Dieu : Dieu agit
au cœur de l’humanité et se laisse approcher à travers l’expérience humaine. Il
est certain que la personnification de la Sagesse divine fait l’objet
d’interprétations radicalement opposées entre les Juifs et les chrétiens. Nous
disons que, dès avant la création du monde, le Fils éternellement engendré vit
et agir avec le Père. Tout a été fait par lui, avec lui et pour lui. Et il nous
est dit que la Sagesse trouve ses délices parmi les fils des hommes. Ce qui
peut vouloir dire que le Christ, Sagesse de Dieu, nous invite à devenir
participants de la nature divine. Le psaume 8 invite à une telle lecture, il
peut d’ailleurs être lu aussi bien par Jésus que par nous, émerveillés par la
splendeur de la création et participants à cette œuvre comme le Christ. C’est
dans le Christ que nous participons à cette œuvre.
Quand saint Paul
dit que « Dieu fait de nous des justes par la foi », il exprime
quelque chose d’essentiel sur quoi la partie occidentale de l’Eglise s’est
divisée à la Renaissance. Le salut ne résulte pas de nos mérites mais seulement
de la grâce pure de Dieu. Alors que, pécheurs, nous sommes condamnables, Dieu,
au lieu de nous punir, pardonne et nous rend justes, nous ajuste à lui, nous fait
devenir fils ou filles de Dieu dans le Christ. Il n’y a aucun mérite de notre
part. Seulement la foi. Logiquement, saint Paul affirme : « notre
fierté est précisément d’avoir part à la gloire de Dieu ». La gloire de
Dieu se manifeste par l’œuvre de création et l’œuvre plus grande encore de
notre rédemption. Si nous sommes sauvés et rachetés, nous participons
évidemment à la gloire de Dieu. « Mais ce n’est pas tout ; la
détresse fait notre orgueil, puisque la détresse produit la persévérance, la
persévérance produit la valeur éprouvée, la valeur éprouvée produit
l’espérance ; et l’espérance ne trompe pas, puisque l’amour de Dieu a été
répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint ». Paul parle d’expérience, les
épreuves ne lui ont pas manqué et il sait que, dans l’épreuve, ou on s’effondre,
ou on donne la preuve de ce qui fait vivre. Notre Bienheureux Vladimir a vécu
cela aussi, jusqu’au martyre. Il suffit d’évoquer les dernières années de sa
vie. Alors que la désespérance s’abattait sur la Roumanie, Vladimir continuait
d’aider, de secourir, de soutenir. Dans sa dernière lettre à son frère, il se
déclare même professeur d’espérance. Fondé sur l’amour, il espère. Donnant de
l’amour, il donne des raisons d’espérer.
Le bienheureux
Vladimir vivait une communion d’amour. Profondément uni au Christ, il avait
l’art de mettre les gens en communion avec Dieu et les uns avec les autres. Il
avait compris trois choses : la 1ère que la vie chrétienne
consiste à être fils de Dieu dans le Fils de Dieu : c’est déjà l’œuvre de
l’Esprit-Saint. Deuxièmement, que la vie spirituelle consiste à entrer avec le
Fils en relation avec le Père. Et que, troisièmement, l’amour du Père et du
Fils est ouverture, invitation et partage. Ce mystère de communion se retrouve
dans l’Eglise qui, du fait de l’unité dans la très sainte Trinité, est
forcément une et, qui, par sa mission, est ouverte à tous pour que tous
connaissent cette communion d’amour qui est proprement le salut. L’évangile
qu’on a lu est ce que nous possédons de plus précis sur la vie des trois
personnes divines. C’est de là que vient aussi la querelle du Filioque qui
continue encore d’opposer l’Orient à l’Occident. Cette querelle consiste en
ceci : est-ce que le don de l’Esprit vient du Père ou vient du Père et du
Fils ? Les Latins ont eu tort d’ajouter ce Filioque au Symbole de
Nicée-Constantinople. Mais qu’il procède du Père ou du Père et du Fils,
l’important, c’est que l’Esprit-Saint nous guide vers la vérité tout entière.
Vladimir ne s’est pas arrêté à cette querelle ; il a vécu dans la
communion de toute l’Eglise qui reflète la communion du Père et du Fils dans
l’Esprit-Saint. Sa mort elle-même fut communion au sens le plus large, au sens
du désir de Dieu, car, autour de lui, se trouvaient un juif, un musulman qui recousit
sa soutane, un prêtre orthodoxe et même un prêtre catholique… américain.
Que les
chrétiens cessent de dire que la Trinité est un mystère auquel il n’y a rien à
comprendre. Ce n’est pas par la raison que nous y pénétrons mais par l’amour.
Dieu a déposé en nos cœurs son amour pour que nous l’aimions en dépit de
l’écart qu’il y a entre l’homme et Dieu. Toute prière, toute action est
suscitée par l’Esprit-Saint qui, dans l’Eglise, nous fait continuer l’œuvre de
rédemption et de recréation du Fils pour la gloire de Dieu le Père. Je vous
rappelle l’attachement du Bienheureux Vladimir à la messe parce qu’elle est
trinitaire. Dans la messe nous avons ce mouvement d’offrande de nous-mêmes à
Dieu le Père dans la communion avec le Fils de Dieu qui s’offre éternellement à
son Père L’Esprit Saint réalise la présence du Christ et nous unit à lui. En
nous aimant jusqu’à donner sa vie pour nous, le Christ rend grâce à Dieu son
Père pour l’œuvre qu’il accomplit. Que dans la docilité à l’Esprit-Saint, à
l’instar du Bienheureux Vladimir Ghika, nous fassions de nos vies une éternelle
offrande pour le salut du monde à la gloire du Père, et que nous unissions
notre action de grâce à celle du Christ à jamais vivant.
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